dimanche 28 décembre 2014

Noël et l’humanisme anthropocentrique

Des fêtes de Noël dans sa famille, on ressort souvent avec l'impression d'avoir trop mangé... et, plus précisément sans doute, d'avoir trop mangé d'animaux morts.

Quelques jours passent : animaux morts, vin, chocolat, de temps en temps un verre d’eau pour faire style, et beaucoup d’esquive de maintenance informatique. 
[...] 
Le matin de Noël, je suis en mode furtif [...] je traverse le salon tel un ninja obèse. Les enfants regardent un dessin animé, c’est drôle, ces trois derniers jours j'ai bouffé absolument tous les animaux présents dans l’épisode 

(ioudgine, sur son blog)

Le fait de visualiser une volaille, un crustacé dans son entièreté, ou tout simplement l'opulence d'un plat peuvent aboutir à cette formulation (et donc à cette prise de conscience)... que ne provoquent jamais ni un mets préparé, ni un filet (Lévi-Strauss dirait un "lambeau").

« Au fur et à mesure des années, ce qui constituait un animal domestique vivant a progressivement disparu de tout état de visibilité ». La plupart des gens ne mangent plus que sa chair – laquelle, une fois dans l’assiette, évoque de moins en moins la bête dont elle vient. Le comble est atteint avec le hamburger : à Chicago, une étude a montré que 50 % des enfants des classes moyennes ne faisaient pas le lien avec un animal. « La conséquence de cette logique, qui est en connivence avec l’élevage industriel, c’est que l’acte de manger est devenu totalement irresponsable : c’est un acte qui ne pense pas ».

Dans Le Monde du 24/12, la journaliste Catherine Vincent met en effet "la philosophie à l'épreuve de la viande". Elle donne la parole à plusieurs philosophes ou intellectuels (loin de tous être végétariens)

Dans leur immense majorité, les Anciens ne se sont intéressés à l’animal que pour démontrer combien l’homme en était différent. Combien il leur était supérieur.

C’est ce qu’on nomme l’humanisme anthropocentrique : une conception fondée sur l’idée de l’exceptionnalisme humain, que la tradition judéo-chrétienne n’a fait que renforcer. Notamment le christianisme, selon lequel la bête a été créée pour le bien de l’homme, centre et maître de la création.

Toute la tradition philosophique occidentale sera marquée par cette coupure ontologique entre l’homme et l’animal. Et il faudra attendre Jacques Derrida, et sa déconstruction du propre de l’homme, pour qu’enfin la question soit posée : comment a-t-on pu à ce point légitimer la violence envers l’animal ? Précisément en le nommant « l'animal », plutôt que de parler des animaux, répond-il. Car « l'animal » n'existe pas, si ce n'est pour désigner l'ensemble des vivants pouvant être exploités, tués et consommés hors du champ de la morale et de la politique. Le meurtre de « l'animal » n'est pas reconnu comme tel. Alors qu'il y a bel et bien « crime contre les animaux, contre des animaux ».

Comme Derrida, Elisabeth de Fontenay l’affirme : « Il n'y a aucun fondement philosophique, métaphysique, juridique, au droit de tuer les animaux pour les manger. C'est un assassinat en bonne et due forme, puisque c'est un meurtre fait de sang-froid avec préméditation. »


La question que pose la viande dérange, forcément, tant les habitudes sont ancrées (depuis le néolithique !). Si elle vous intéresse, reportez vous à l'article sus-mentionné. Sans même parler écologie, un premier pas pourrait être de s'opposer à l'élevage industriel... (tout en étant conscient qu'un tel combat éluderait la problématique fondamentale)


Catherine Vincent, La philosophie à l'épreuve de la viande,
dans Le Monde du 24/12/2014

mercredi 24 décembre 2014

We set the star so high

Careful, one by one
It is undone
Seems before it's over
It's begun

Another broken reindeer
Another candle
Another velvet ribbon
Another nosebleed

Winding up the lights
We set the star so high
So high
So high

Low, Taking Down The Tree
Christmas EP (Kranky, 1999)

dimanche 14 décembre 2014

2014, un palmarès

Allez, voilà, c'est aujourd'hui, l'article qui formalise mon bilan musical 2014.
Dix albums tout d'abord, puis quelques autres, suivis d'une liste de morceaux (à retrouver, partiellement, dans le dernier volume de Top Tape).
Je liste enfin quelques concerts remarquables de cette année.
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N'hésitez pas à partager dans les commentaires tout ou partie de votre sélection personnelle !



Les Albums
Metronomy – Love Letters
Future Islands – Singles
Taulard – Les abords du lycée
Yawn – Love Chills
La Dispute – the Rooms of the House
-
Frànçois and the Atlas Mountains – Piano Ombre
Fauve – Vieux Frères, Part.1
Radiator Hospital – Torch Song
Homeboy Sandman – Hallways
Tape – Casino

Comme toujours sur ce blog, cette sélection est subjective et consacre les albums que j'ai le plus de plaisir à ré-écouter. L'ordre est finalement assez peu significatif. Metronomy et Future Islands se chippaient régulièrement la première place. Objectivement, François and the Atlas Mountains devraient être un peu plus haut, mais voilà j'écoute d'avantage ce qui le précède. Ont un temps été envisagés pour intégrer le haut du panier Alden Penner, Axxa Abraxas, Oh! Pears, Solander... en réalité, un peu tous les albums qui suivent, et que je vous recommande chaudement :

Absolutely Free – s/t
Alden Penner – Exegis
Anjou – s/t
Avi Buffalo – At Best Cuckold
Axxa Abraxas – s/t
Chevalrex – Catapulte
C’mon Tigre – s/t
Bad Bad not Good – III
Caught in the Wake Forever – My Family Goes On Without Me
Clark – s/t
Gontard! – Blitz EP
Hamilton Leithauser – Black Hours
I Love You but I've Chosen Darkness – Dust
Jacquemort – La Montagne de Feu
Freddie Gibbs and Madlib  Piñata
the Fresh And Onlys – House Of Spirits
Karen O – Crush Songs
Koloto – Mechanica EP
Loscil – Sea Island
Mac de Marco – Salad Days
Morgan Delt – s/t
Music Go Music – Impressions
the Notwist – Close to the glass
Oh! Pears – Wild Part Of The World
Ought – More Than Any Other Day
Rentals (the) – Lost in Alphaville
Rodrigo Amarante – Cavalo
Sawako – nu.it
Sisyphus – s/t
Solander – Monochromatic Memories
Stanley Brinks and the Wave Pictures – Gin
Tara Jane O'Neil – Where Shine New Lights
the Wedding Soundtrack – Let's not talk about the past
Xeno and Oaklander – Par avion
Wimp – Propergols

Quelques morceaux mémorables, maintenant (outre bien sûr ceux qui composent les albums précédents). S'il fallait n'en retenir qu'un, ce serait Braken, We put the Pop in Unpopular... mais je tenais à citer tous ces noms : 

Angel Olsen – White Fire ; Bear in Heaven – Autumn ; Blonde Redhead – Penultimo ; Bloum – Faith ; Bracken – We Put the Pop In Unpopular ; Caribou – Can't Do Without You ; Coming Soon – Lookaway ; Dean Wareham – The Dancer Disappears ; the Coral – Wrapped in Blue ; Faded Paper Figures – Not the End of the World (Even As We Know It) ; Flume and Chet Faker – This Song Is Not About a Girl ; Francis Lung – A Selfish Man ; François Tarot – Stanley Brinks  ; Guided By Voices – Jupiter Spin ; Iceage – On My Fingers ; the Keys – the Last Laugh ; the Magic Numbers – You K(no)w ; the Magic Numbers – Wake up ; Octave Minds - Toghether ; Phantogram – Fall in Love ; Posse – Zone ; Protomartyr – Want remover ; Seoul – Stay with us ; Rural Alberta Advantage – All We’ve Ever Known ; Spoon – Rainy Taxi ; Sylvan Esso – Coffee ; Vilain – Rag Dolls ; Woods – Twin Steps ; Yumi Zouma - the Brae

Et puis, une sélection de concerts, auxquels j'assisterais de nouveau sans hésiter, si l'occasion m'en était donnée :
21/1 Yuck @ Trabendo
15/2 Loscil @ Espace B
14/3 Gablé @ Auditorium du Louvre
12/5 Future Islands @ Trabendo
25/5 Neutral Milk Hotel @ Trianon
20/6 Bachar Mar-Khalifé @ St Eustache
22/9 Blonde Redhead @ Trianon
1/11 Taulard @ Mécanique Ondulatoire
28/11 RIEN @ Maroquinerie

S'y ajoutera peut-être la prestation commune de Mendelson et We Insist! Jeudi à Mains d'Oeuvre?

jeudi 11 décembre 2014

J'aime trop l'idée d'une vie sans racine

Nos concerts c'était vraiment de la bombe
quand avec mes frères, nous sillonnions le monde 

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François Tarot (Les Disques Bien) qui propose une "couverture" de Stanley Brinks (ex-André Herman Düne, faut-il le rappeler) en français dans le texte, que rêver de mieux ?


(au chant, sur ce morceau, Dana Boulé)


François Tarot, Stanley Brinks
Guernesey (Les disques bien, 2015)
https://francoistarot.bandcamp.com/album/guernesey-chansons-lp-2015
(allez également tout de suite écouter "Si doux si tendre", la couverture de "Sweet and tender hooligans" des Smiths!)

Pour les paroles originales, c'est là :
http://arise-therefore.blogspot.fr/2011/05/i-became-enemy-of-society.html

mercredi 10 décembre 2014

Love Chills [Top Tape] - bilan 2014


Après cinq articles consécutifs portant sur l'aspect visuel d'une sélection d'albums parus cette année, il est désormais temps de parler réellement musique. Ainsi donc, dimanche, était diffusée sur Radio Campus Paris ma mixtape de fin d'année, uniquement composée d'albums ou singles 2014 absolument remarquables.

Top Tape Vol.2 (S7) s'écoute ici et vous pourrez y entendre Oh! Pears, Alden Penner, Taulard, Metronomy, Future Islands, Xeno and Oaklander, the Do, Music go Music, Sylvan Esso, Homeboy Sandman, Koloto, Notwist, Solander, Yawn, La Dispute et Octave Minds.

Bonne écoute !

La prochaine émission sera diffusée le 4 janvier... J'y jouerai quelques groupes ambiant / post-rock qui n'ont pu, hélas, intégrer cette sélection.  

lundi 8 décembre 2014

Are We There / 2014 Best Album Covers (Part.5)

Suite et fin de ma sélection des plus belles pochettes d'album 2014, avec pour la plupart des visuels en noir et blanc assez classieux. Et des fenêtres.
A suivre, mon bilan musical (mixtape + article en bonne et due forme).

Sharon Van Etten, Are We There

Illum Sphere, Ghosts of Then and Now

Grouper, Ruins

Celer, Sky Limits

jeudi 4 décembre 2014

Extra Stuff / 2014 Best Album Covers (Part.4)

Avant-dernier volet de mon best of des pochettes d'albums 2014.
Une sélection genrée, j'avoue.


Laetitia ShériffPandemonium, Solace and Stars


Computer MagicExtra Stuff EP


Warpaint, s/t


Banks, London EP


Dads, I'll be the tornado


Drowners, s/t


Yumi Zouma, the Brae


Suite et Fin, Vendredi...

mercredi 3 décembre 2014

Brand New Love / 2014 Best Album Covers (Part.3)

De jolis visuels d'albums, encore, cette fois dans une veine plus graphique.
Suite de la sélection, demain Jeudi !

Teleman, Breakfast

the New Pornographers, Brill Bruisers

Tycho - Awake

the Go Find, Brand New Love

Clipping, CLPPNG

mardi 2 décembre 2014

Let it shine / 2014 Best Album Covers (Part.2)

Deuxième volet de ma sélection 2014 de pochettes d'albums, pictural cette fois.

DeptfordGoth Songs

Submotion OrchestraTrust Lust

Honig, It's Not A hummingbird, it's Your Fathers Ghost

the Jezabels, the Brink

Damn Seagulls, Let it shine

La suite, demain...

lundi 1 décembre 2014

Tough luck / 2014 Best Album Covers (Part.1)

Importation du Black Friday oblige, ce Samedi avait déjà un parfum de mois de Décembre dans les magasins. Côté musique, quelques premiers tops albums ont déjà été publiés... C'est bien le signe que la fin d'année approche, et avec elle, cet irrépressible besoin de listes et autres classements destinés à figer les aspects mémorables de l'année bientôt révolue. Mon palmarès 2014 suivra d'ailleurs dimanche prochain (au moins dans sa version radiophonique).

Le préalable à ce rendez-vous sur Arise Therefore est, depuis 2011, la publication des plus belles pochettes d'albums (si vous avez loupé un épisode, tout est centralisé ici).
C'est donc ce qui vous attend tout au long de cette semaine, avec la publication d'un volet par jour, jusque Samedi.

Je ne perds bien entendu pas de vue l'approche Crossed Covers, aussi chaque ensemble de pochettes aura sa cohérence propre.

Eagulls, Tough luck / Opaque

Bath, EP

Sir slyyou haunt me

Yumi Zouma, Alena

Frànçois and the Atlas Mountains, Piano Ombre

Random forest,st

A suivre, demain...

dimanche 30 novembre 2014

Des bouts de ciel se défont

Me voici à nouveau sur ce blog à parler de tout et de Rien. Il faut dire que le dernier concert (parisien) du groupe grenoblois était grandiose, avec une version (allongée?) de Masterkraft des plus intenses, et surtout, le morceau que je réclamais depuis des années, Stare Mesto, qui plus est dans sa version chantée, puisque Jull était présent ce soir-là, déclamant ce texte, véritable poème surréaliste (au sens propre du terme). Fin de cette longue phrase.


Je revois des visages comme dans un rêve...
Tous ancrés dans le même espace-temps
Ca se passe dans une ville que j'ignore
Une ville grise avec un port
C'est tout ce dont je me souviens
Et les gens je me rappelle bien
Et toutes les versions corroborent
D'abord il y a une jeune fille
Elle est assise sur la grève
De l'autre côté du rivage
Elle porte un feutre
Et sa bouche est comme un nuage
Elle fait chanter ses bracelets
A un petit bout d'homme sans visage
Le petit homme a l'air content
Il a un œil comme un cheval
La crinière qui penche en avant
Et comme s'il était d'un autre âge
Il traîne dans ses mouvements
Il est tard
Et la ville se change en étoile
Un peu plus loin trois enfants jouent
L'un d'eux peine à tenir debout
Au large un bateau fait escale
Il y a des lumières sur le pont
Un trait rouge un peu dans le fond
Et deux jaunes qui forment un signal
Tout à coup un homme se dévoile
Et d'une main la fille lui répond
Il y a un commencement d'orage
Et des bouts de ciel se défont

La jeune fille a quitté la plage
Et elle nage dans sa direction
Le petit bout d'homme sur la grève
Trace un cercle avec un bâton
Il dessine avec précision
L'homme, les enfants, la barge
Quelques bouts de ciel dans le fond
Et la fille qui dans son sillage
Change l'eau en chape de plomb...

Rien, Stare Mesto
Requiem pour des Baroqueux (l'amicale underground, 2003)
www.amicale-underground.org
https://rien.bandcamp.com/

Pour vous faire une idée de ce grand moment, cette vidéo, tournée Vendredi à la Maroquinerie :

mardi 25 novembre 2014

Rien ne sera bientôt plus

Comme chacun de vous, j'ai appris il y a peu que David Lynch et Marc Frost réactiveraient prochainement la série Twin Peaks, écriraient et produiraient 9 nouveaux épisodes, pour une diffusion courant 2016.

Ce que j'ignorais, c'est que le timing ne devait rien au hasard.
Twin Peaks, dernier épisode, Between Life and Death (1991) :



1991 + 25 = 2016 (donc)


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Si 2016 sera l'année d'une renaissance, 2014 pourrait bien être celle d'un fin annoncée.
La fin de Rien. Extrait de la newsletter envoyée dimanche dernier.

La plaisanterie n'a pas assez duré, elle a duré ce qu'il fallait. Il devait être minuit et demi dans ce squat grenoblois, le premier décembre 1999, t'en souvient-il ? Vous portiez des bonnets péruviens pour jouer un rock languide sur fond de chants de baleines. Vous êtes sortis de scène sous une timide salve d'applaudissements. Tu t'es retourné vers moi et tu m'as dit «ceci durera quinze ans ».

Le premier décembre 2014. La promesse sera tenue.

Rien ne sera bientôt plus. Juste le temps de sortir un dernier disque, d'honorer une dernière tournée, de terminer le boulot correctement par respect des mêmes principes qui nous poussent à suicider l'aventure à tout jamais. Si dans vingt ans, Thom Yorke se déplace en personne de son aéronef planant au-dessus de l'Ardèche pour nous demander un concert exceptionnel, on lui crachera à la gueule. Qui est-il pour mettre en doute la parole donnée ? Certaines personnes se croient tout permis.

Vendredi, je verrai en effet mon douzième et dernier concert du groupe grenoblois RIEN. D'ici peu, mon t-shirt RIEN (1999-2014) acheté en 2006 aura perdu de son impact. Au final, 
"Requiem pour des baroqueux", "Il ne peut y avoir de prédiction sans avenir", "3", "2", et bientôt "1" [pré-écoute] constitueront donc leur discographie complète.


"Ci-gît Rien, et rien d'autre"


Qu'allons nous devenir lorsque nous n'aurons plus Rien ?




Centenaire+ Aquaserge + Rien, en concert Vendredi 28 novembre
@ Maroquinerie, (soirée Gonzaï)

RIEN, 1 (L’Amicale underground, 2014)

mercredi 19 novembre 2014

Tout ce qu'on s'est dit cette nuit

"L'Eclipse" s'ouvre par un silence pesant, qu'une jeune femme et son fiancé peinent à rompre.


- Alors, Ricardo?
- Qu'y a-t-il?
- Il y a tout ce qu'on s'est dit cette nuit...


Si dialogue il y a eu, il s'est tenu en dehors du film. Devant nos yeux, et que ce soit avec Ricardo ou Piero (Alain Delon), beaucoup de questions ne recevront pour réponse que le silence, ou un "je ne sais pas" bien peu satisfaisant.

Pourquoi on pose tant de questions? A-t-on besoin de se connaître pour s'aimer? Et a-t-on besoin de s'aimer ?

De l'Eclipse, les cinéphiles retiennent surtout le formalisme du final (/!\ Spoiler /!\). Le contraste avec les paroles qui le précèdent est saisissant. Vittoria et Piero se quittent sur des mots et des gestes pleins de promesses :


- On se voit demain ?
- [Vittoria acquiesce]
- On se voit demain, et après-demain.
- Et le jour suivant, et l'autre encore.
- Et celui d'après.
- Et ce soir.
- A huit heures. Même endroit.

Suit une séquence mémorable dépassant les 7 minutes, montrant la ville sous différents angles. A mesure que le jour décline, la bande-son se fait plus inquiétante. Le lieu de rendez-vous reste quant à lui vide, désespérément vide. 


L'éclipseMichael Antonioni (1962)

dimanche 16 novembre 2014

Ça commencera comme ça, par une indiscipline

Dans une chronique intitulée "Chère Fleur Pellerin" (Libération du 14/11), Christine Angot s'adresse à la Ministre de la Culture, qui avait concédé il y a peu "n'[avoir] pas du tout le temps de lire depuis deux ans." Elle y cite de larges passages d'une interview de Marguerite Duras datant de 1985

La prose est belle, Marguerite Duras conjugue sa vision de l'Homme au futur, avec un phrasé me rappelant les affirmations poétiques d'Alexandre dans "La Maman et la Putain"

Je retranscris ici ses propos dans leur intégralité. L'auteure répondait à l'interrogation suivante : "Les hommes ont toujours eu besoin de réponses, même si un jour elles s'avèrent fausses ou seulement provisoires. Alors en l'an 2000, où seront les réponses ?"

"Il n'y aura plus que ça, la demande sera telle qu'il n'y aura plus que des réponses, tous les textes seront des réponses en somme. Je crois que l'homme sera littéralement noyé dans l'information, dans une information constante. Sur son corps, sur son devenir corporel, sur sa santé, sur sa vie familiale, sur son salaire, sur son loisir. C'est pas loin du cauchemar.

Il n'y aura plus personne pour lire. Ils verront de la télévision, on aura des postes partout, dans la cuisine, dans les water closets, dans les bureaux, dans les rues... Où sera-t-on ? Tandis qu'on regarde la télévision où est-on ? On n'est pas seul. On ne voyagera plus, ce ne sera plus la peine de voyager. Quand on peut faire le tour du monde en huit jours ou quinze jours, pourquoi le faire ? Dans le voyage il y a le temps du voyage. C'est pas voir vite, c'est voir et vivre en même temps. Vivre du voyage, ça ne sera plus possible. Tout sera bouché. Tout sera investi.

Il restera la mer quand même. Les océans. Et puis la lecture. Les gens vont redécouvrir ça. Un homme un jour lira. Tout recommencera. On repassera par la gratuité. C'est à dire que les réponses à ce moment-là, elles seront moins écoutées. Ça commencera comme ça, par une indiscipline, un risque pris par l'homme envers lui-même. Un jour il sera seul de nouveau avec son malheur, et son bonheur, mais qui lui viendront de lui-même.

Peut-être que ceux qui se tireront de ce pas seront les héros de l'avenir, c'est très possible. Espérons qu'il y en aura encore.

Je me souviens avoir lu dans le livre d'un auteur allemand de l'entre-deux-guerres, je me souviens du titre, "Le dernier civil", de Ernst Glaeser, ça, j'avais lu ça, que lorsque la liberté aurait déserté le monde, il resterait toujours un homme pour en rêver.

Je crois... Je crois que c'est déjà commencé même."


vendredi 14 novembre 2014

Scary World Theory [Crossed Covers]

A l'occasion de l'absence TOTALE d'actualité de Lali Puna, petit récap en pochettes de la discographie de ce groupe allemand dans lequel jou(ai)ent Markus Acher [the Notwist] et Valerie Trebeljahr.



Lali PunaScary World Theory (2001), Tridecoder (Morr, 1999), Non-Com-Pop Rmx (2001), Our Inventions (2010), Faking the Books (Morr, 2004), Silver Light (2012).

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